Stellantis au bord du gouffre ? Pas si vite. Tandis que ses perspectives se réduisent en Europe et aux Etats-Unis, le groupe automobile mise sur une start-up chinoise qui surpasse Tesla en rentabilité. Et si le salut de Stellantis venait d’Asie ?
Le constructeur Stellantis fait face à une multiplication de vents contraires. Après le ralentissement du marché de l’automobile européen en sortie de pandémie, le regain de protectionnisme outre-Atlantique est venu ajouter de l’incertitude dans un contexte financier déjà tendu.
Les analystes scrutaient avec attention la publication des résultats semestriels, et ceux-ci ont été catastrophiques. Au cœur de l’été, Stellantis a fait état d’un chiffre d’affaires en baisse significative et d’un résultat net négatif se comptant en milliards d’euros. Sur les six premiers mois de l’année, le groupe a essuyé une perte de 2,3 Mds€, l’équivalent de près de 9 % de sa capitalisation boursière.
Fort naturellement, le cours boursier de l’action du groupe reflète ses mauvais résultats financiers. Le titre efface plus de 43 % sur un an, et a touché un plus-bas à 7,4 € quelques jours après l’annonce des résultats semestriels – matérialisant ainsi une chute de valeur de -70 % depuis le printemps 2024.
Evolution du cours de l’action Stellantis depuis début 2024. La baisse se prolonge – jusqu’à quand ?
Infographie : TradingView
Dans ce tableau morose, les raisons d’opter pour l’optimisme se font rares. Malgré ses nombreuses implantations aux Etats-Unis, le groupe est directement touché par les droits de douane décidés cette année par la Maison-Blanche.
La seule surtaxe de 25 % imposée au mois d’avril aurait coûté, selon les estimations de la direction, 330 M€ entre fin avril et fin juin. Avec près de 40 % des véhicules vendus aux Etats-Unis assemblés à l’étranger, le groupe s’est avéré particulièrement vulnérable. Sur place, la situation a été si confuse que Stellantis a décidé de mener des arrêts temporaires de production dans ses usines, le temps de remettre à plat ses chaînes d’approvisionnement internationales.
Dans le même temps, le marché européen est toujours à la traîne. Sur les six premiers mois de l’année, 6,81 millions de voitures neuves ont été immatriculées sur le Vieux Continent, soit une baisse de 0,9 % par rapport à l’année 2024 qui était déjà considérée comme une année de crise. Pire encore, la baisse s’accélérait au début de l’été. Au mois de juin, les immatriculations se sont établies à moins de 1,25 million de voitures, soit une contraction de 5,1 % sur un an.
Cet été, les usines du groupe tournent à moins de 55 % de leur capacité maximale, contre un taux d’utilisation moyen de 73 % dans le secteur.
Le constructeur automobile semble s’engager sur une voie similaire à ce qu’ont connu en leur temps HP, Kodak et Nokia. La distribution d’un généreux dividende en début d’année (8,2 % au cours actuel) ne parvient plus à soutenir le cours de l’action, les opérateurs ayant anticipé – à raison – le plongeon des résultats. Alors qu’il semble évident que le coupon ne pourra être maintenu à son niveau actuel au titre de l’exercice 2025, c’est le principe même du versement d’un dividende au printemps prochain qui est de plus en plus compromis.
Pourtant, Stellantis a encore une carte à jouer.
Alors que tous les analystes scrutent par habitude ses ventes en Europe et aux Etats-Unis, le groupe possède un atout encore ignoré par le marché : son implantation en Chine.
Si la débâcle des marques occidentales dans l’Empire du Milieu est désormais actée, Stellantis a eu l’intelligence de maintenir une exposition sur place. Son cheval de Troie, Leapmotor, suit même une trajectoire de croissance exponentielle.
Leapmotor, le Petit Poucet plus rentable que Tesla
Alors que la plupart des constructeurs européens ont tiré un trait sur le marché chinois durant la pandémie, Stellantis a pris la décision contrarienne d’investir pas moins de 1,5 Md€ dans Leapmotor en 2023.
Le pari était risqué tant la marque était confidentielle, et noyée parmi la myriade de constructeurs de véhicules électriques locaux.
Bien lui en a pris, puisque Leapmotor fait partie des rares constructeurs à pouvoir se targuer d’avoir tous ses voyants au vert.
Côté commercial, les ventes sont en hausse exponentielle. Le constructeur de voitures vertes a livré plus de 50 000 véhicules au mois de juillet, en hausse de 126 % sur un an. Ce chiffre représente un record dans l’histoire de l’entreprise, et la hisse brutalement sur le podium des plus grands constructeurs chinois. Il s’approche fortement des ventes de Tesla Chine, qui ont chuté de leur côté de 8,4 % sur un an pour s’établir sous les 68 000 unités (exportations en Europe comprises). Même le leader du secteur BYD, lui aussi en croissance à trois chiffres sur le marché des véhicules propres, ne semble plus intouchable avec 80 700 unités vendues sur la même période.
Mais le plus impressionnant est que cette prouesse commerciale et industrielle ne s’est pas faite au détriment des performances financières.
Sur le premier semestre, Leapmotor a affiché une marge opérationnelle de 14 % – un ratio qui ferait rêver les marques occidentales (celle de Tesla est tombée à 4,1 % au deuxième trimestre 2025). La start-up chinoise a même atteint le seuil de rentabilité cette année, dégageant un premier bénéfice de 4 M€. Si le montant est encore symbolique, il témoigne d’une capacité à évoluer de manière rentable devenue rare dans un marché où la guerre des prix fait rage.
Stellantis vers un « miracle Dacia » ?
Les actionnaires et analystes de longue date de Stellantis seront pardonnés d’être perturbés par la situation actuelle. La suprématie des marques européennes sur le marché mondial de l’automobile s’est envolée, et le groupe est dans une situation typique de fin de cycle économique.
Entre des normes de plus en plus pressantes en Europe, une perte de pouvoir d’achat des consommateurs, et des mesures isolationnistes et inflationnistes aux Etats-Unis, les perspectives de croissance à court terme sont quasi-inexistantes pour les marques historiques du groupe.
Dans le même temps, Leapmotor devient un acteur de poids à l’échelle internationale. Si ses ventes sont aujourd’hui principalement réalisées en Chine, la marque dispose déjà de plus de 400 points de vente dans 13 pays européens. En Europe, la Leapmotor T03 est proposée à partir de 16 900 € tandis que le SUV électrique C10 de la marque est disponible dès 30 250 €. Des prix à première vue identiques à ceux déjà pratiqués par les constructeurs européens sur leurs modèles d’entrée de gamme, mais le constructeur dispose de confortables marges pour proposer des tarifs plus attractifs.
Le dernier modèle B01, lancé au mois de juillet en Chine, propose ce qui se fait de mieux en termes de mobilité propre. Doté d’une autonomie de 650 km, il supporte la charge rapide et est équipé du LiDAR qui manque tant aux Tesla. Le tout pour un tarif public de 10 700 € seulement.
Le Leapmotor B01 : une proposition de valeur haut de gamme pour le prix d’une petite citadine française.
Photo : Leapmotor
Avec Leapmotor, Stellantis pourrait reproduire le « miracle Dacia » qui a participé, en son temps, à la transformation du groupe Renault. Le meilleur moyen de regagner des parts de marché consiste à s’appuyer sur une marque capable de rompre le cercle vicieux de la hausse continue des prix, qui freine les volumes. Les derniers mois ont même prouvé que Leapmotor était capable de fonctionner de manière rentable.
Stellantis dispose d’une opportunité historique de retrouver un second souffle sur le marché du véhicule électrique. A moyen terme, la situation n’est pas aussi désespérée qu’il n’y paraît !




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